Frustration et espoir

tout ce que le second opus vous inspire.

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Frustration et espoir

Messagede slippeur » Jeu Aoû 11, 2005 10:26 pm

J'ai refermé « In Tenebris » il y a environ une heure.
Le commentaire sera donc à  chaud...

Pour être tout à  fait franc, j'attendais pas mal de ce livre, tant j'ai pu parcourir de critiques dithyrambiques et admiratives sur l'auteur ces derniers mois. Ce n'est pas tout les jours qu'on rencontre un maître en devenir, un prodige bientôt incontournable, et à  lire en VO s'il vous plait.

Ce livre me laisse un sentiment paradoxal de déjà  vu mais de singulier cependant.

De déjà  vu par l'accumulation de détails glanés, consciemment ou non, ça et là , dans les fascinations morbides et malsaines d'une génération accompagnée à  l'adolescence par les oeuvres de King, les riffs de Nirvana et le cinéma de la fin des années 90, de « Seven » et sa ribambelle d'avatars au récent mais fabuleux « Saw». Du déjà  vu dans l'ambiance, poisseuse et nocturne, grinçante et démente, des tréfonds citadins où on s'apprête au détour d'une page à  croiser Nicolas Cage à  la recherche d'un snuff movie ou Edward Norton à  la recherche de sa vérité...
Du déjà  vu, certes mais dans lequel on se fond, parce que ces recoins sinistres ne nous sont pas tout à  fait inconnus... Oh, on ne peut pas dire qu'ils nous sont familiers, mais on a quand même un peu idée de la faune tapie dans la ruelle, de ce satané plancher qui grince à  contre temps...
Malheureusement, au delà  du décors le déjà  vu touche aussi quelques fausses pistes jetées sans aucune raison finalement tant la grossièreté du procédé serait insultant pour le lecteur. Alors à  quoi bon ? Se demander si les 350 pages passées n'ont servi de rampe qu'à  cette solution lourdaude esquissée ? Heureusement non... mais on peut reprocher ce côté trop visuel à  l'intrigue semblant influer sur l'identité même du Mal. Ce besoin de quelques surenchères dans le répugnant, parfois gratuitement, jouant sur cette limite où la fascination morbide se dispute à  l'abject... Parce qu'à  la différence d'un Marc Lévy, on sent Maxime Chattam n'écrit pas que pour qu'on l'on visualise ses mots. Il y a un fond derrière la forme parfois prévisible, des non dits et un passé, et non des personnages falots transparents et interchangeables à  souhait. Pas un livre cachant un mince scénario raccommodé laissant augurer l'ambition d'un bon petit film suintant de guimauve et sponsorisé par une marque de cornets de glaces et la dernière radio à  la mode, derniers atouts d'un succès annoncé au box office.
En outre, frustrant ce sentiment que certains paragraphes ont été coupés...
On les imagine là , s'écartant du sentier de l'intrigue, se perdant dans les méandres de l'être au mépris du suspens. A l'instar de King dont on ne retient à  tord que le côté «épouvante» alors qu'il est probablement un des écrivains ayant le mieux décrit l'adolescence et la nature humaine dans son contemporain et son universel, dans ses petites habitudes qu'une frontières si mince sépare de la chute... Contrairement à  l'aspect sordide et violent revendiqué, c'est bel et bien l'humain qui est au centre de l'oeuvre. Point d'enfer ou de croquemitaine, point de blanche colombe mais des êtres touchés, rapiécés de frustrations, de remords et de rages, exacerbés ou renfermés. Mais tous unis, tous partageant un point commun. Cette solitude.
Ces paragraphes, autant de scènes coupées qu'on a plaisir à  voir dans les bonus du DVD, s'insurgeant contre le réalisateur coupable d'une telle trahison, refusant d'entendre les arguments relatifs à  la nervosité du montage...Les abysses de ses héros, quand il effleure la solitude dans toute sa dignité. En cela l'épilogue constitue probablement le plus beau passage de l'oeuvre, débordant d'humanité après une plongée dans les tréfonds d'une nature humaine à  l'avenir présenté incertain.

«L'authentique substance de la lucidité humaine est la tristesse».

De quoi se rassurer finalement, car comme le chante si bien Thiéfaine «La tristesse est la seule promesse que la vie tient toujours...»
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Messagede Eska » Mer Sep 28, 2005 12:26 am

Très complète et très bien écrite....voici une belle et surtout une vraie critique....ça fait du bien, puis pour ce qui est des scènes coupées, ben elles seront dans le deuxième DVD de l'édition collector de In Tenebris....mais pour ça je pense qu'il faudra attendre encore quelques années..... :roll:
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